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Hjortshoj : un village éco-citoyen exemplaire ?

C’est en 1986, à l’occasion d’une séance de l’Université populaire d’Aarhus, que l’idée de fonder une société coopérative s’est présentée à George Gaugler et Kaj Hansen. Tout deux y formulaient leur vision d’une société durable. Séduits par leurs idées, certains participants décidèrent rapidement de passer du discours à la pratique et de porter cette vision, a priori utopique, d’une communauté sociale et écologique.



Dès 1987, la municipalité d’Aarhus se laisse en effet convaincre d’octroyer une parcelle de terrain de plusieurs hectares au groupe porteur du projet. Le choix des participants s’arrête sur un terrain, à la périphérie de la ville, près du village de Hjortshoj. Après avoir présenté leur projet aux habitants du village et avoir obtenu leur accord, le premier groupe achète alors 5 000 m2 de terrain constructible et loue 24 hectares de terrain cultivable à la ville.

Le groupe devra alors s’acquitter de nombreuses formalités administratives complexes afin d’obtenir le droit de mener leur projet. Quatre années de démarches seront nécessaires pour construire les premières maisons. A titre d’exemple, faire accepter les toilettes sèches en tant qu’expérimentation leur prendra deux années. Les familles pionnières, souhaitant mener à bien leurs chantiers, fonderont une société de construction expérimentale intitulée Okotech, dont le concept consiste à commercialiser les innovations issues de leur expérience. La demande d’expertise en matière de construction écologique insuffisante à l’époque ne permettra pas à la société de prendre son essor. Si bien que celle-ci disparaîtra avec l’accomplissement des derniers projets de construction de l’éco-village.

Au fil des années, le village s’est développé et compte désormais près de 250 habitants répartis au sein de huit groupes d’habitation. Ces derniers constituent non seulement un ensemble de logements écologiques mais, plus encore, un lieu de vie collectif. Leur formation s’est opérée au cours d’un processus délicat, selon les affinités de chacun. Une fois constitué, chaque groupe est devenu un corps social très fort et s’est doté de ses propres règles, notamment en matière de construction. Ainsi, dans les années 80 le premier groupe s’est concentré sur l’origine des matériaux utilisés pour la construction des logements. Durant les années 90, les derniers groupes à s’installer se sont focalisés sur l’efficacité énergétique des bâtiments.

Hjortshoj n’est pas seulement un ensemble de maisons écologiques, c’est également un lieu de vie collectif où chacun est libre d’apporter ses compétences dans le respect de l’environnement. C’est ainsi qu’une quarantaine de groupes de travail se répartit le soin d’entretenir le verger biodynamique commun, de gérer l’organisation du centre d’auto-partage, des évènements culturels et des repas en communs. A Hjortshoj tout le monde participe à la mise en place d’un système durable qui n’est pas uniquement réservé à une élite. Le choix de construction qu’il soit en locatif, en privé, où en HLM, a depuis le départ, ouvert le village à tous les groupes sociaux. La diversité était un objectif fixé dès le départ afin de ne pas transformer l’éco-village en un ghetto écologique. Ceci a amené à la création d’un partenariat avec un bailleur social auquel a été délégué une partie des logements locatifs. Suite à cela, de vives tensions ont pu émerger. Les nouveaux habitants emménageant dans ces logements sociaux ne sont pas systématiquement sensibilisés aux questions environnementales. Ils peuvent donc éprouver certaines difficultés à s’intégrer à la communauté.

A bien des égards, le modèle de l’éco-village danois n’est pas facilement reproductible. Il est né dans un contexte et une époque particulière durant laquelle la commune d’Aarhus a fait confiance à un groupe de personnes suffisamment motivées pour porter ce projet à terme. De plus, l’éco-village amène à se poser la question de la taille adéquate d’une telle communauté. Initialement prévu pour 500 personnes, l’éco-village compte aujourd’hui 250 habitants et ne va probablement pas s’agrandir par peur de perdre sa cohésion. Mais ce choix n’est-il pas au final contradictoire avec le critère de densification propre au développement durable ?

Rémy Mazet pour Eurêka 21, Juin 2010

A découvrir bientôt également sur notre site : l’entretien mené par Eurêka 21 avec Pierre Lecuelle sur le caractère unique de l’écovillage de Hjortshoj.

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