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Örebro : taxer, responsabiliser et soutenir les services publics pour les rendre plus durables – L’INTERVIEW

La municipalité suédoise d’Örebro a mis en place un programme de taxation carbone de ses employés afin d’améliorer la durabilité de ses services municipaux. Tomas Bergkvist, coordinateur du projet et urbaniste à l’Office du climat d’Örebro, nous présente cette taxe, son fonctionnement, ses objectifs et ses modalités de mises en place.



Eurêka 21 : Pouvez-vous nous présenter en quelques mots la municipalité d’Örebro ?

Tomas Bergkvist : Située à égale distance de Stockholm, Göteborg et Oslo, Örebro est une ville centrale et cosmopolite au cœur de la Suède. Elle compte parmi les villes les plus peuplées du pays avec près de 133 000 habitants.

E21 : Comment est né le projet ?

T.B. : C’est en 2008 que le projet voit le jour lorsque la ville décide d’introduire une taxe climat afin d’inciter les services municipaux à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Sa mise en place est alors confiée à l’office climatique responsable notamment de l’évaluation des dispositions prises dans le cadre du plan climat ainsi que des mécanismes financiers.

E21 : Quel est le coût d’un tel système pour la commune ?

T.B. : En 2009, la taxe carbone a coûté à la commune près de 700 000 couronnes suédoises, soit 73 000 euros. Cependant, il est important de garder à l’esprit que cet argent est directement réinjecté dans les finances publiques. La taxe carbone mise en place à Örebro doit avant tout être perçue comme un dispositif non pas de sanction mais de redistribution. En taxant les activités les plus polluantes, la commune accroit les capacités financières des activités qui contribuent à réduire leur impact environnemental.

E21 : Comment les employés ont-ils réagi à cette taxe ?

T.B. :Il est encore trop tôt pour le savoir. Pour l’instant, aucune étude n’a été menée sur la question. La plupart des employés municipaux semblent toutefois s’accorder sur l’utilité d’une telle taxe. Tous semblent en effet conscients des enjeux climatiques auxquels devra faire face la collectivité. Jusqu’à présent je n’ai donc jamais eu de réactions négatives de la part des employés de la municipalité.

E21 : Avez-vous constaté un impact sur le comportement des employés ?

T.B. : Il serait prématuré d’évaluer l’impact de cette taxe carbone sur le comportement des employés. A long terme, nous espérons assister à une véritable prise de conscience et à un changement réel des comportements en faveur des éco-gestes. On anticipe ainsi, une baisse significative du recours à la voiture pour les déplacements. Les suédois ont en effet toujours été très sensibles aux questions liées à l’environnement et au développement durable.

E21 : Quels types d’actions sont menés avec l’argent collecté ?

T.B. : Depuis sa création, l’argent prélevé grâce à la taxe carbone a permis à la municipalité d’Örebro de mener à bien plusieurs actions. D’importantes mesures ont été prises, par exemple, dans le domaine des transports publics. Une campagne de sensibilisation et d’aménagement a été lancée afin de favoriser les modes de déplacements doux et notamment en vélo. De nouveaux vélos et remorques à vélos ont été mis à disposition en ville. Certaines chaussées ont également été réaménagées afin de pouvoir accueillir de nouveaux supports à vélos. Parallèlement, un programme de formation à l’éco-conduite a été financé. Dans un tout autre domaine, un programme de sensibilisation sur les questions nutritionnelles a été mis en place afin, par exemple, de lutter contre le gaspillage et de promouvoir les aliments d’origine végétale. Des fonds ont ainsi été alloués aux établissements scolaires pour l’achat de balances électroniques grâce auxquelles elles peuvent évaluer la quantité de nourriture gaspillée chaque jour par leurs élèves. Ces données sont alors utilisées dans le cadre d’un programme de sensibilisation aux éco-gestes destiné aux élèves.

E21 : L’idée de la taxe carbone a t-elle séduit d’autres municipalité ?

T.B. : Oui, quatre autres municipalités de la région ont d’ores et déjà mis en place des mécanismes similaires.

E21 : Que recommanderiez-vous aux villes souhaitant mettre en place une taxe carbone similaire ?

T.B. : Oui, je recommande vivement aux villes souhaitant réduire leurs émissions de gaz à effets de serre d’adopter des mécanismes similaires. Pour ce faire, il est important dans un premier temps de ne taxer uniquement que les activités polluantes sur lesquelles les entreprises ont réellement un pouvoir de décision. Il est important que les entreprises visées par un tel mécanisme puissent modifier leur comportement et opter pour des techniques moins polluantes. Il est aisé de compenser une baisse du recours à la voiture par une utilisation accrue de modes de déplacement doux comme le vélo. Le mode de taxation défini par la collectivité devrait également être facile à mettre en œuvre et ne devrait nécessiter que très peu d’ingénierie financière. Il peut toutefois s’avérer difficile de déterminer un juste niveau de taxation. Il est donc préférable d’augmenter le taux de prélèvement très progressivement et de ne taxer qu’au fur et à mesure de nouvelles activités. Enfin, il est crucial pour la municipalité de disposer d’une politique de déplacement incluant une taxe climat. Celle-ci doit en effet être partie intégrante d’une politique climatique globale et doit être associée à d’autres mécanismes incitatifs afin d’induire une synergie positive.

E21 : En trois mots, comment décririez-vous ce projet ?

T.B. : Ce projet est à la fois durable, intuitif et stimulant !

Propos recueillis par Cédric Burgun pour Eurêka 21, Juin 2010

A découvrir également sur notre site : l’article d’Eurêka 21 consacré à l’Agenda 21 de la ville d’Örebro.

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