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GWL-Terrein, premier projet sans voiture en Europe

En 1989, la compagnie des eaux de la ville d’Amsterdam déménage, laissant vacant un terrain de 6 hectares. A l’initiative du conseil du quartier de Westerpark, la municipalité lance le projet GWL-Terrein, consistant en la construction d’un quartier écologique sans voiture. Les résultats sont aujourd’hui concluants puisque 73% des trajets sont non motorisés.



Initialement, le départ de la compagnie des eaux (GWL) devait donner lieu, sur décision du conseil de quartier, à un projet de reconversion en zone résidentielle. Avec l’élection en 1990 d’un conseil de quartier à majorité verte et sociale-démocrate, il fut décidé que le futur quartier devrait être piéton, lançant ainsi le premier projet de « car free housing » en Europe. Une annonce fut publiée dans un journal local, interrogeant les habitants du quartier : « Nous voulons créer un projet d’habitations sans voiture et écologique. Seriez-vous intéressés à y participer ? » ; En un mois, près de six mille personnes ont répondu positivement. La municipalité lança un appel d’offre auprès d’entrepreneurs privés. Ceux-ci furent peu enthousiastes, jugeant qu’un lotissement sans voiture se vendrait mal. Après le recours à une société de travaux publics et le lancement d’un concours, cinq architectes néerlandais ont été sélectionnés. Commença alors la préparation du premier plan de construction élaboré en partenariat avec les citoyens entre 1990 et 1992. Des soirées de débat furent organisées entre les architectes et les futurs habitants du quartier afin d’échanger sur les propositions. Une journée portes ouvertes eut également lieu afin de présenter le projet final aux citoyens.

En 1993, la construction commença et reposa sur quatre grands concepts : l’absence de voiture, la réutilisation des ressources, les économies d’énergie et d’eau et enfin la cohésion sociale. Si de nombreux bâtiments durent être entièrement créés, certains anciens édifices de la compagnie des eaux furent gardés et réhabilités, afin de conserver une identité au lotissement. Les différentes idées des architectes furent confrontées puis mises en commun pour aboutir à un grand îlot ouvert composé de bâtiments en brique rouge et d’un grand espace vert. L’absence de voiture leur a permis une grande liberté de conception. Ils ont particulièrement été vigilants sur les transitions entre espaces publics, semi-publics et privés pour favoriser les rapports sociaux. On peut trouver des jardins publics, des aires de jeux pour les enfants et de petits potagers privatifs au pied de chaque immeuble.

Lors de la construction, chaque détail de la vie courante a été étudié pour y apporter des solutions durables adaptées. Les toits sont recouverts de verdure, permettant le captage et le filtrage de l’eau de pluie alimentant les toilettes. Les chemins ne sont pas pavés pour permettre à l’eau de s’infiltrer dans la terre, s’écoulant dans un étang souterrain purifiant l’eau. La question du recyclage a été partiellement réglée par l’utilisation de déchets comme source de chaleur. Toutes les propositions ne se sont pas concrétisées. Si les habitants souhaitaient installer des panneaux solaires sur les toits pour l’électricité, un contrat avait déjà été signé avec une compagnie d’électricité.

Après quatre ans de travaux, le quartier a été finalisé. Protégé du vent et des bruits de la ville par deux grands immeubles, le quartier se compose aujourd’hui de dix-sept nouveaux bâtiments ainsi que d’anciens rénovés : le château d’eau a été remis en fonction et donne au quartier un certain marqueur identitaire, l’ancienne usine a été transformée et abrite aujourd’hui des bureaux et un café restaurant, alors que l’entrepôt est devenu une salle de réunion et le bureau des gardiens. Six cent logements ont été construits, se répartissant entre logements sociaux, logements accessibles à la propriété, et logements particuliers construits au rez-de-chaussée des immeubles pour les personnes handicapées et les personnes âgées. Cette diversité d’offre contribue à la mixité sociale au sein du quartier. Des locaux accueillent de petits commerces non-alimentaires car la demande du quartier n’a pas été estimée suffisante pour l’implantation de commerces de proximité.

Des parkings ont été construits en dehors du quartier. Les places ont été attribuées lors d’une loterie et ne peuvent accueillir qu’une voiture par ménage, soit un total d’une centaine de places pour près de six cent ménages. Cette politique de dissuasion a d’ailleurs porté ses fruits, puisque si 30% des ménages possèdent encore une voiture, 15% ont décidé de s’en défaire au profit d’autres moyens de transports. La ville d’Amsterdam a étendu la ligne de tram et deux lignes de bus desservent GWL-Terrein, avec une fréquence de dix minutes. L’utilisation du vélo se confirme que ce soit pour se rendre au travail ou pour accompagner les enfants à l’école. Aujourd’hui, 73% des trajets sont non motorisés, trois résidents sur quatre possèdent un vélo, 39% des habitants ont ou ont eu une carte de transport. Pour ceux ayant encore besoin d’un véhicule motorisé, deux agences de car sharing sont implantées : 10% des habitants ont pris un abonnement.

Les habitants de GWL-Terrein se sont peu à peu adaptés aux exigences d’un quartier écologique et sans voiture, faisant de ce premier exemple européen une réussite.

Marie Weishaupt pour Eurêka 21, Août 2010

A découvrir également sur notre site : l’entretien mené par Eurêka 21 avec Diego Pos, habitant du quartier et membre du comité d’administration d’une association locale

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